- « Ecriture et imprimé : le cas de l’écrivain-journaliste espagnol L. Alas « Clarín » (1852-1901) », en : Alain Riffaud (ed.), L’écrivain et l’imprimeur, Rennes, PUR, 2010, pp. 293-313 (versión en portugués: • « Escrita e impresso. O caso do escritor-jornalista espanhol Leopoldo Alas « Clarín » (1852-1901) », Livro. Revista do núcleo de estudos do livro e da edição, n° 2 (2012), pp. 177-189).

 


        

Dans l’un de ses articles publié dans le n° 399 de El Solfeo, le 10 novembre 1876, Leopoldo Alas (a) Clarín se souvient de ce qu’entre 13 et 15 ans il a été poète —un poète romantique, du genre « Pompes funèbres »— et il ajoute : « Permettez-moi de verser une larme en souvenir de mes illusions poétiques d’alors, pleines de sauttises et de chevilles[1] », ce qui donne lieu 10 jours plus tard à une mise au point par lui-même, dans un autre article, publié dans le même journal, le 20 novembre 1876 : « comme il se peut —écrit Clarín— que dans 100 ans quelque antiquaire tombe sur le numéro 399 de El Solfeo, je n’aimerais pas que la postérité puisse penser qu’il y eut un certain Clarín qui se traitait lui même de sot[2] » et nous apprend que là où il avait écrit le mot portugais saudades (qu’on a l’habitude de traduire par nostalgie), le typographe a lu « sandeces » soit sauttises, tout comme le lecteur de l’époque ou, en 2001, l’ éditeur « antiquaire» de cet article. « Les typographes —ajoute Clarín—m’ont attribué une modestie dont je sens incapable. Qu’il soit clair par conséquent, dans les siècles des siècles, que cette supposée sauttise ne m’appartient pas[3]».

         Ce qui peut paraître une des innombrables coquilles plus ou moins dignes d’une anthologie (Bontmy, 2005) introduit et met en scène, me semble-t-il, un système de relations entre l’écrivain Clarín, les typographes ou cajistas (de caja=casse) et plus globalement l’imprimeur qui restent anonymes et les lecteurs contemporains ou « antiquaires » qui détermine autour de la forme typographique et imprimée les conditions de l’écriture du texte et de la construction de son sens que je me propose d’examiner.

 

Clarín et le cajista. On sait encore peu de choses sur l’imprimerie et les ouvriers du livre espagnols de la fin du XIXe siècle, du moins du point de vue technique et professionnel (cf. Botrel, 1993, 207-262 et 2005)  et encore moins sur ceux qui, entre 1875 et 1901, ont composé et imprimé les 2 400 articles, deux romans, quatre recueils de contes, six recueils de critique, etc. du journaliste, critique, romancier (un peu connu en France à travers La Régente), et même dramaturge Clarín, dans les journaux où il a collaboré ou les livres ou brochures dont il est l’auteur[4]. Au delà des noms des imprimerie et de ceux de un ou deux protes, c’est l’anonymat ou l’impersonnalité qui caractérise « los cajistas» ou « la imprenta », pratiquement toujours évoqués comme relevant d’un groupe ancillaire et subsidiaire, au service —voire aux ordres— de l’auteur que symptomatiquement on représente avec une plume (d’oie) (ILLUST. 4)—quelquefois avec des livres sous le bras, mais comme lecteur—et non comme producteur de textes typographiques, comme pour dissocier deux sphères pourtant si imbriquées, en privilégiant la source et la création  plutôt que l’objet résultant de la production. D’ailleurs Clarín, à la différence d écrivains comme Galdós, Juan Ramón Jiménez, Emilio Prados ou Altolaguirre (Neira, 2000, 2008),  a peu fréquenté les ateliers d’imprimerie et les imprimeurs, sauf peut-être au tout début de sa carrière journalistique de « rédacteur » de El Solfeo, entre 1875 et 1877 (cf. Botrel, 2002ab), où l’on peut peut-être imaginer des corrections sur le marbre, car, par la suite (à partir de 1883), Clarín qui réside dans les Asturies se trouve  à quelque 500 km et plus de 24 heures (par train et diligence)  de Madrid ou Barcelone où sont imprimés la plupart de ses textes. Avec les imprimeurs et les typographes, il n’a donc que des relations médiatisées, par l’intermédiaire du directeur du journal ou de l’éditeur, mais aussi, observons-le, des relations différentes selon qu’il se glisse dans un collectif (un journal ou une collection) ou qu’il peut agir sur les choix typographiques. Car s’il ne fréquente pas les typographes, Clarín a une évidente culture typographique qu’il s’efforce d’appliquer à la production matérielle de ses textes[5].

         Du travail des cajistas, on ne dispose, dans le cas de Clarín, que de très peu de traces : en effet, on ne connaît pas, au jour d’aujourd’hui,  d’épreuves de ses textes et les manuscrits de lui conservés sont rares. Il faut dire qu'à l'exception de La Regenta, Su único hijo, Teresa ou les Folletos literarios, quasiment toutes les autres oeuvres sont des produits journalistiques qui, pour certains d'entre eux, ont fait l'objet de collection en livres à partir d'états imprimés. De là l'hypothèse que Clarín qui n'a pas de secrétaire et qui écrit sans guère de repentirs a traité l'ensemble de son oeuvre comme une production de type journalistique, avec pour conséquence —désastreuse pour les généticiens du texte— une importance équivalente à nulle accordée à l'état manuscrit d'ailleurs calamiteux pour les typographes étant donné l'écriture de Clarín, les épreuves successives lorsqu'elles existent, étant considérées comme des manuscrits bis, c’est-à-dire considérées a priori comme devant permettre un travail sur un texte dont l'achèvement n'a pas d’emblée été vraiment visé.

         Sur tout de processus et sur les relations de Clarín avec l’imprimé et les imprimeurs/les typographes,  c’est donc sa correspondance avec un éditeur et un directeur de journal qui, outre les textes publiés dans la presse, donne, pour l’instant[6], le plus d’indications, avec comme conséquence non anodine que c’est le point de vue de l’auteur qui se trouve privilégié.

Que nous apprennent ces observations ou commentaires sur les relations entre l’auteur et les typographes ?

Comme la totalité des journalistes et écrivains à son époque en Espagne, Clarín compose de façon manuscrite sur des cuartillas (le quart d’une feuille), presque toujours du même format, avec une écriture démoniaque et endiablée (Botrel, 2009, 13-14) —il y a une sorte de coquetterie ou de cabotinage attaché à cela[7]— due, pour partie, à l’urgence qu’il y met (« ou j’écris vite ou je n’écris pas », dit-il) et qui l’amène et ne prêter que peu d’attention à la « matérialité de l’écriture [8] » . Une conséquence prévisible —et prévue— de ces « pattes de mouche » sur le travail des typos est évidemment, au stade de la composition, outre les inévitables coquilles, la multiplication des lectures erronées[9] —et pas simplement des noms propres—, aux conséquences parfois cocasses, sans compter les phrases et même les paragraphes sautés ou chaotiquement assemblés[10], ou encore une note malencontreusement incorporée au texte, des inversions de cahiers, etc., quand il ne s’agit pas de suppressions pures et simples à l’initiative du directeur du journal[11]. C’est ce qui amène Clarín à parfois exiger des deuxièmes épreuves « sans faute ».

Faute de disposer de placards ou premières épreuves (galeradas), l’analyse des 130  erratas (et quelques autres)  subsistant (après correction des premières épreuves) dans certains premiers tomes de La Regenta [12], nous permet d’en savoir un peu plus sur le travail et la culture des typographes.

Cela va de la confusion dans la lecture d’une voyelle ou d’une consonne affectant la marque du genre ou du nombre mais aussi le sens d’un mot sens (plutónico/platónico/tenía/temía, frentes/fuentes), par ignorance de l’orthographe (variaban/bañaban) ou de la graphie de certains noms propres (Etoa/Stoao, Maleschott/Moleschott), de lectures erronées (cabeza/colera, ya me muevo/mareo todas las ideas/los días, continencia/antinomia ; correctivo/coercitivo ; hallaba el cálculo/cubo) avec, pour le lecteur, d’évidentes conséquences sur le sens de la phrase (« aquel obispo alarmándole/ abrumándole con su humildad »; « ses yeux n’étaient qu’une sorte de pénétration/ponctuation des mots/sus ojos no eran más que un modo de penetración/puntuación de las palabras »), certaines coquilles non corrigée renvoyant à lapsus ou erreurs de l’auteur lui-même (Mesía/don Víctor/delante/allí) et à des corrections de style (partido/bando).

De la culture des typographes, rendent compte, non seulement la correcte (en général) interprétation typographique des noms des personnages ou auteurs, mais aussi quelques manifestations d’hypercorrection : ainsi, si pour sa « brochure littéraire » Apolo en Pafos, Clarín se méfie de ce qui peut advenir de bon nombre de noms grecs corrigés dans les premières épreuves, il constate aussi que là où il avait bien clairement écrit Diona (soit Dioné, la mère d’Aphrodite), les typos se sont avisés de le corriger en mettant Diana (Diane) et pour éviter tout risque d’ambigüité, décide de changer le nom [13].

Ce qui est sûr, c’est que les capacités d’interprétation de l’écriture de Clarín par les typos de l’époque —y compris lorsqu’il s’agit de noms propres étrangers— remplissent d’admiration (et d’envie) les transcripteurs actuels de ses manuscrits ou lettres…

Clarín a néanmoins tendance à répartir les torts[14] et même parfois à oublier qu’il peut être la cause essentielle de tant d’erreurs, et manifeste souvent son agacement voire son indignation devant la négligence des cajistas. C’est là que la tension entre la double autorité à l’œuvre dans le texte se manifeste le mieux et le plus clairement, à propos des deuxièmes et troisièmes épreuves lorsqu’elles ont existé.

Clarín qui utilise les premières épreuves (quand il en dispose) comme manuscrit-bis, souhaite pouvoir disposer de placards bien imprimés et aux marges suffisantes pour pouvoir y faire les nombreuses corrections et ajouts nécessaires[15]. On peut supposer qu’à ce stade aussi, les mêmes causes produisent les mêmes effets, mais ce n’est pas de cela que Clarín se plaint : ce qui lui est insupportable parce qu’il s’agit d’une sorte d’atteinte à son autorité, c’est qu’on ne tienne pas compte des ses corrections ou indications et il le manifeste avec une impérieuse insistance[16]: il peut s’agir de simples oublis qui parfois se retrouvent dans les deuxièmes épreuves en feuilles, voire dans les épreuves en pages [17], mais aussi d’une sorte de conflit d’autorité ; c’est le cas manifestement s’agissant de la ponctuation : « pour ce qui est de la ponctuation, on ne m’obéit pas toujours »  se plaint-il, en ajoutant : « et les virgules, il n’y a que l’écrivain qui sait ce qu’elles veulent dire qui puisse les mettre là où il faut [18]» On verra plus loin que les préoccupations de Clarín qui aspire à ce que ses livres «soient impeccables » ( « salgan limpios »), soit sans coquilles vont bien au delà et concernent la forme même du livre.

S’agissant pour l’instant du simple stade de la composition —celui où intervient le typographe—, observons que celui-ci a par insuffisant professionnalisme, par inertie ou par savoir professionnel qui inclut une certaine culture, a un effet de résistance qui s’inscrit dans le texte original, quelquefois durablement et même définitivement, quand il s’agit d’articles de presse non recueillis en volume, et, dans tous les cas, implique à l’horizon de l’auteur une présence comme concurrente, voire déterminante, ainsi que des conséquences immédiates originales sur la production du texte, mais aussi sur le sens qu’in fine peuvent donner à l’œuvre de Clarín, ses lecteurs successifs.

 

2. Le texte de Clarín et du cajista.

La première conséquence, paradoxale (parce que Clarín ne fait aucun effort pour livrer des manuscrits plus lisibles) mais aussi logique (étant donné son écriture), c’est la hantise de la coquille, non pas seulement parce que, comme on l’a vu,  Clarín aime à ce que ses livres sortent « impeccables» « des presses, mais parce que une partie de la critique de Clarín est une critique pointilleuse, orthographique et grammaticale, qui porte sur des « fautes » au regard de l’orthodoxie et que, évidemment, lorsque, involontairement, par la faute du cajista, il est pris en défaut, ses adversaires ne se privent pas pour lui en attribuer la responsabilité : « étant donné la nature de mes livres, ces coquilles m’ennuient énormément[19] », plus précisément, elles l’exaspèrent , car elles sont «prétexte à médisance[20] ». Lorsqu’il imagine que sa « brochure littéraire » Apolo en Pafos va pouvoir être publié avec pratiquement pas de coquilles, cela est pour lui un grand motif de profonde réjouissance, car s’il assure n’accorder aucune importance à ce que peuvent dire ces « petits messieurs » , le fait est que « les criticailleurs se sont avisés de s’acharner sur elles[21] » Or, la plupart du temps, s’agissant d’articles de presse, Clarín ne corrige pas d’épreuves. D ‘où ses recommandations, entre injonction et supplique, adressées au directeur du journal : « Attention aux coquilles », « prenez soin de mes épreuves », « attention aux épreuves (de l’article) d’aujourd’hui car mon écriture est difficile», « voilà quelque chose d’innommable ; je l’ai écrit à minuit après souper. Je n’ai pas le temps de le relire, il se peut qu’il y ait des répétitions, mille erreurs. Prenez grand soin je vous en supplie des épreuves y même de la grammaire parce que je ne réponds de rien » ; « prenez bien soin des épreuves car c’est écrit à toute vitesse ») [22]. Et l’on trouve les mêmes recommandations pour la réalisation du simple programme d’une série de conférences[23]. Lorsqu’il lui est donné de les corriger, on s’aperçoit qu’il attache une attention particulière à certains éléments expressifs de la typographie comme l’italique, par exemple[24], qu’il se plaint amèrement à nouveau lorsque les corrections n’ont pas été apportées[25], même si, pour le lecteur, le sens ne s’en est pas trouvé affecté : c’est ainsi, par exemple,  que pendant 90 ans (jusqu’à la publication des lettres de Clarín à son éditeur Manuel Fernández Lasanta (Blanquat, Botrel, 1981, 60), le lecteur de Su único hijo qui n’a  pas connu de nouvelle édition du vivant de son auteur, a lu « cantata » (« cantate ») au lieu de « contrata » (« contrat » ou « engagement », d’ailleurs sans conséquences majeures.

La deuxième conséquence est que, s’il est évidemment dépendant pour le texte (typographique) de ses articles de la lecture des typos et des corrections du prote ou du directeur, curieusement, lors d’une édition ultérieure sous forme de livre par exemple, Clarín ne rétablit presque jamais, les textes tronqués, sans doute parce qu’il n’en a pas les moyens  (il n’a pas gardé l’original, ne se souvient pas de ce qu’il a écrit, etc.) ou parce qu’il pense qu’après tout la version journalistique, fruit de la coopération entre lui et le cajista ou l’éditeur, n’est pas si mauvaise.

La troisième conséquence est que les coquilles et les erreurs sont pour lui l’occasion de variations discursives le plus souvent amusantes et ironiques où le personnage collectif des cajistas est convoqué pour une confrontation ludique et comme complice, sur un mode généralement hyperbolique et ironique, avec l’auteur journaliste sous les yeux du lecteur. C’est par exemple, l’insurrection qu’il a pu  provoquer chez les cajistas du journal El Imparcial[26], le fait que les mêmes cajistas aient fait Clarín appeler Rentoy un certain Rentz, qui s’en est publiquement plaint, quand, commente Clarín, « Dieu ne s’est pas plaint à moi de ce que en certaine occasion on me l’ai fait appeler Diez[27] », ou encore la disposition erronée de blocs de lignes dans un article qui, sous la plume de Clarín, devient un « indescriptible labyrinthe » qui ressemble à « un de ces tremblements de terre de Quito, magistralement dépeints par Alexandre Humboldt : les terres autrefois délimitées, se trouvent à présent, après la catastrophe, mélangées, imbriquées et confondues, chaque propriétaire voit la moitié de son terrain dans le terrain du voisin, les rangées d’arbres autrefois rectilignes se présentent sous forme de capricieux zigzags …rudis indigestique moles.Eh bien tel est l’état du feuilleton dans le numéro 459 de El Solfeo» (Alas, 2003a,  858).. Cet incident typographique est aussi  prétexte à une leçon de morale, lorsque : Clarín se souvient —publiquement—n’être pas allé au delà de la première ligne d’un recueil de contes d’un jeune écrivain galicien après y avoir découvert un « énorme et épouvantable » solécisme mais d’en avoir néanmoins fait la critique sur la base de ce qui s’avéra être une « majuscule erreur » du cajista, et d’avoir refusé de revenir sur son jugement péremptoire et erroné, le jeune auteur payant donc pour les cajistas ». Et on ne manquera pas, bien sûr, de rappeler, pour conclure sur ce point, que c’est sous la forme chaotique que lui a donné le cajista et dont s’amuse Clarín sous forme d’une digression dans le cours du conte lui-même, que nous connaissons, pour l’éternité, « La vocación » (Alas, 2003a, 858).

La coquille fait donc parfois doublement sens, en prenant une signification nouvelle dans le continuum que permet l’écriture périodique et qui disparaît, évidemment, avec le recueil sélectif ou anthologique. D’où pour l’éditeur chronologique, la nécessité corollaire de ne pas amender la version erronée , de ne pas rétablir la « bonne lecture », pour de pas priver la suivante d’une partie de son sens.

Sous forme de quasi provocation, je dis souvent que l’œuvre journalistique de Clarín (les trois quarts de son œuvre) est le résultat d’une coopération entre le typographe et lui.

L’examen des relations entre l’écrivain et l’imprimeur nous confirme dans cette idée de l’insoutenable (pour certains) relativité du texte.

 

         3. Le projet typographique.

Si l’on s’attache à présent à l’examen des relations entre l’auteur et l’imprimeur (et non plus le typographe), à travers l’éditeur, celles-ci rendent compte d’une volonté  de la part de l’auteur d’affirmation sur l’être physique du livre, une aspiration à le définir et contrôler, avec une sorte d’irruption dans un domaine traditionnellement ( ?) réservé à l’imprimeur ou à l’éditeur, une volonté plus ou moins affirmée d’instrumentalisation de l’imprimeur de la part d’un auteur qui aspire à être imprimeur ou éditeur par procuration et une résistance ou une feint de non recevoir plus ou moins affirmée de celui-ci, selon sa personnalité et son professionnalisme[28].

Les exemples sont nombreux qui vont de la proposition d’un modèle (un autre livre ou une ligne éditoriale, française en général) à des indications très précises en amont ou lors de la correction des épreuves, concernant le format, corps à utiliser, le papier, la mise en page, les marges,  le titre courant, la couverture, la page de titre, le titre courant, la  disposition des chapitres[29], etc. Les indications de Clarín concernant l’édition et l’impression du « Folleto literario » intitulé A 0.50 poeta peuvent servir d’exemple : « Je souhaite, écrit-il à son éditeur, que vous preniez particulièrement soin de l’édition et de la typographie. Comme ce folleto est un folleto exceptionnel, plus court que les autres je souhaiterais un certain luxe qui compenserait la taille, le faible volume[30]. Les deux citations que je fais de Villegas et Argensola doivent être imprimées dans leur page respective, celle du verso devant rester en blanc sans répétition du titre, placé le plus possible en bas de page, et chacune de celles-ci ne doit abriter que peu de tercets, toujours le même nombre, cinq ou six au maximum, séparés avec une majuscule au début de chaque tercet, même si c’est la phrase antérieure qui se poursuit. Je souhaiterais, si possible, un corps légèrement supérieur à celui des fois antérieures et un papier un peu plus fort. Enfin vous verrez là-bas (l’imprimerie ? JFB) ce que vous pourrez faire[31] ». L’examen de l’imprimé montre qu’il a été partiellement tenu compte des souhaits de l’auteur : il y a  effectivement une citation par page, le verso est resté en blanc, les tercets sont présentés séparés et avec une majuscule au début de chacun, chaque page comporte 27 lignes de 6,3 cm seulement

au lieu de 29 de 7, 2 comme dans Mis plagios, mais dans chaque page, il y huit tercets au lieu des cinq ou six souhaités. Mais au vu du résultat pour lui malgré tout décevant, Clarín ne peut que mentionner les éléments typographiques qui ont fait défaut : « pour ce qui est du faible volume,  cela aurait pu être évité avec « beaucoup de blancs, un corps supérieur, peu de tercets dans chaque page »[32], avec cette réflexion révélatrice d’un dessein typographique et esthétique que n’a pas su avoir l’éditeur ou l’imprimeur concernant la forme de la brochure : « dans ces respirations (anchuras)  il y a une sorte de luxe lorsqu’on sait bien choisir les proportions[33] ». Car, si, du point de vue de l’éditeur, le faible volume est un inconvénient commercial, pour l’auteur, dans la polémique qui l’oppose à Manuel del Palacio, il y a manifestement une valeur symbolique mais aussi signifiante, attachée à l’apparence et à l’être du livre, d’une simple brochure en l’occurrence.

         En tout cas, il est certain que Clarín attache la plus grande importance à dessiner ses livres, y compris des parties traditionnellement laissées à la discrétion des typos, du prote ou de l’imprimeur comme la page de titre ou la couverture dont il déclare vouloir assumer la responsabilité. A titre d’exemple, on peut donner celui de El Señor y lo demás, son cuentos[34], ou ce qu’il écrit à propos de la couverture de Su único hijo [35]: dans le premier cas, il sera exaucé, dans le second, la force de l’habitude ou la volonté éditoriale sera la plus forte. Quoi il en soit, il y a bien tension entre deux mondes, celui de l’auteur et celui de l’éditeur ou imprimeur, des mondes associés, complémentaires, mais non toujours convergents dans leurs vues.

         Le cas des ornementations et illustrations insérées dans le texte de la première édition de La Regenta (Botrel, 1998ab) ou de ses contes, qui représente alors une véritable innovation s’agissant de l’édition non « populaire », mérite des considérations à part.

Alors qu’il a collaboré à un journal illustré entre 1875 et 1877 et, à nouveau à partir de 1883 (dans Madrid Cómico), contrairement à d’autres écrivains, comme Pereda, Galdós ou Palacio Valdés, Clarín se montre peu curieux et informé des techniques de la reproduction de l’image alors en pleine révolution avec la photogravure et la ni par les problèmes de mise en page que cela pose: à peine trouve-t-on, en 1883, une demande de renseignement sur la réalisation des illustrations de la « Biblioteca Arte y Letras » (Bensoussan, 1982, 10). En revanche, après avoir manifesté de fortes réticences devant cette imposition et immixtion, il semble l’avoir accepté et, bientôt, même souhaité, en affichant, là aussi, sa volonté de guider l’illustrateur et/ou de le choisir, en n’en retenant cependant que la dimension artistique qui aurait pu avoir des conséquences techniques, pour le rendu du clair obscur, par exemple.

           Il n’est donc pas exagéré de dire que Clarín a une réelle culture typographique et que l’imprimé a pour lui a une fonction signifiante, tant du point de vue symbolique que pratique : il en connaît les principales contraintes codificatrices liées tant au processus de composition qu’à l’architecture de l’imprimé lui-même ; il les accepte mais il s’efforce aussi de contrôler et d’orienter ; la forme imprimée, journalistique ou livresque  est à l’horizon de sa production/création ; il s’y projette littéralement, avec pour conséquences une adaptation du mode de production et de textualisation, la qualité de la coopération avec l’imprimeur et le typographe revêtant une importance toute particulière et même stratégique et quasiment vitale pour lui.

 

         4. Ecrire pour l’imprimé.

Le rapport que Clarín entretient aussi bien avec la forme imprimée (Botrel, 2001), qu’ avec la forme manuscrite est en effet assez original.

Il est assez facile de voir comment Clarín se projette dans la forme imprimée, qu’il s’agisse d’une page de journal ou d’un livre : en écrivant, il voit et lit déjà son texte dans sa forme typographique[36] ; partant, il adapte son écriture et son texte au format du support-livre, et cette sorte de calibrage concerne aussi évidemment la production ordinaire ou périodique, dans une conversion non explicitée entre signes manuscrits et lignes, colonnes ou pages , même s’il se montre constant à essayer de transgresser les contraintes imposées par le directeur dans ce domaine. Dans le processus de production du texte clarinien, il n’y a pas de phase prérédactionnelle, pas d’antétextes. Le véritable brouillon de Clarín est et reste dans sa tête.

Quant à la phase rédactionnelle (de textualisation ou mise en phrases), elle est synonyme d’inscription immédiate et ordonnée dans l’espace de la feuille dont le format est choisi en fonction du projet d’écriture et ne varie guère, de telle sorte qu’on a l’impression que Clarín écrit déjà sa (ses) colonne(s) ou ses pages de livres (ILLUST. 3). De là la présence de la forme typographique dans les manuscrits et un quasi désintérêt pour la matérialité d’une écriture le plus souvent fragmentaire et périodique, les états manuscrits et imprimés se trouvant peu dissociés, voire confondus dans un temps rapproché. On sait que Clarín ne garde guère de copie de son manuscrit, mais surtout qu’il envoie l’original souvent sans que l’œuvre soit achevée : c’est le cas pour La Regenta et Su único hijo, mais aussi pour un certain nombre de contes comme El Cura de Vericueto[37]; il s’agit d’une écriture jaillissante et continue, avec pratiquement pas de repentirs ni de ratures, et souvent illisible pour le lecteur d’aujourd’hui (Botrel, 2001, 156),  tant semble grande la hâte de Clarín d’arriver au bout et de se voir imprimé. Le texte ainsi produit –une sorte de brouillon définitif— est celui qui est envoyé tel quel (sauf pour un certain nombre de contes qui sont préalablement mis au net, avec quelques corrections par rapport au brouillon[38])  à l’imprimerie du journal pour composition et édition quand il s’agit d’articles de journaux (les corrections étant à la charge du directeur ou du prote), et pour composition et corrections successives lorsqu’il s’agit de romans ou brochures : Clarín retravaillera son texte sur épreuves.

Dans ce cas, le véritable travail de « mise au net » ne se fait pas de manière manuscrite, elle se fait sur les placards où les cuartillas manuscrites se fondent et s’évanouissent, comme transmutées : Clarín se sert des épreuves comme d’un brouillon ou d’un original-bis et le typographe est son véritable secrétaire (le seul qu’on lui connaisse). Comme il l’écrit à son éditeur à propose de Apolo en Pafos : « l’écriture est mauvaise et il reste des blancs et autres détails à revoir mais tout rentrera dans l’ordre à la correction des épreuves[39], ou encore :  « l’écriture est très mauvaise mais même s’il y a beaucoup de coquilles ce n’est pas grave parce que à la correction des épreuves je ferai ce que je ne peux faire pour le moment car cela me distrairait du travail[40] ». Ce travail se fait avec (c’est la préférence de Clarín) mais aussi sans l’original sous les yeux[41]: C’est ainsi qu’il faut interpréter cette réflexion où l’auteur de Su único hijo souhaite revoir les premiers chapitres adressés depuis longtemps à l’éditeur et qu’il pensait pouvoir voir sous forme d’épreuves[42]

L’écriture clarinienne étant jaillissante et non stabilisée, c’est donc la transformation typographique qui sert de support pour son achèvement (indépendamment des repentirs et corrections) et une relative stabilisation du texte. Par ailleurs, Clarín a besoin de se voir imprimé pour avancer : pas simplement pour des raisons de commodité (dans le cas d’une nouvelle composition, à partir d’articles de presse, par exemple, Clarín préfère logiquement apporter des corrections non sur ce qui est devenu l’original mais sur les premières épreuves), mais parce que c’est poussé par les corrections d’épreuves, avec la perspective de voir page après page le livre prendre forme qu’il arrive à la fin —si l’on peut dire— de son écriture, comme dans le cas de Su único hijo.

De là, comme chez Balzac (cf. Kamada, 2006), une superposition de la phase rédactionnelle et de la phase pré-éditoriale qui inclut une sorte de jeu stimulant entre le Clarín qui continue d’écrire et celui qui  se voit déjà partiellement imprimé et se corrige, ce qui l’amène en certaine occasion à commenter, à annoter son propre texte déjà imprimé, dans une sorte de méta-écriture typographique [43], pour une sorte de tuilage ou de confusion conceptuelle et temporelle en un seul des états traditionnellement distingués comme étant successifs et une projection d’emblée dans l’état imprimé qui est vu et relativement maîtrisé : c’est ce qui s’est produit pour La Regenta et c’est ce que Clarín aspire à renouveler pour Su único hijo[44], où à certains moments on peut observer que sont gérés en même temps rien moins que cinq états de la production du texte : l’original manuscrit, les premières, deuxièmes et troisièmes épreuves et le livre en feuilles (cf. Botrel, 2001, 159). Pour une sorte de transformation à vue, car  de la même façon que les pages manuscrites de l’article se métamorphosent en caractères d’imprimerie sur la page du journal, le texte du roman prend, avec une célérité surprenante, sa forme livresque, condition finale pour le soulagement et la libération d’un démiurge tourmenté et impatient.

Il semble, en effet, que l'obligation de remettre périodiquement (et régulièrement) de la copie originale -l’écriture périodique- agit comme stimulant pour une écriture réflexe, et de voir le livre prendre progressivement forme donne à Clarín le courage qui souvent lui manque : « je commencerai à vous envoyer quelque chose lorsque j’en serai à la page 250 (de l’original) ; comme cela vous pouvez commencer à imprimer et moi à corriger et du même coup avancer dans la réalisation de l’œuvre, tout en restant à une distance suffisante de l’imprimerie pour ne pas être pris par elle », écrit-il en 1888 à son éditeur[45]. Clarín entame ainsi une sorte de course avec l’imprimerie et s’efforce de ne pas être rattrapé par elle.

Clarín n’accorde pas plus de valeur symbolique aux épreuves successives qu’au manuscrit original : il est tendu vers la production finale de la page de journal, de la brochure (Folletos) ou du livre (pour une recueil d’articles, de contes ou un roman), des formes imprimées dans lesquelles il se projette mentalement et dont il espère qu’elles correspondront à l’idée qu’il s’en faisait, exprimée par avance à l’éditeur ou non. D’où ses récriminations lorsque son projet ne se réalise pas ou quand il se réalise de façon imparfaite.

C’est à partir de cet aboutissement éditorial qu’il nous est possible de reconstituer les phases antérieures qui précèdent. S’agissant des éditions ultérieures, qu’il s’agisse de recueils ou de rééditions, on s’aperçoit que Clarín , traite cette phase éditoriale finalement avec moins d’attention pour le texte lui-même qu’il reproduit souvent en l’état antérieur simplement libéré de coquilles avérées (cf. Botrel, 2009c) qu’à la forme éditoriale que suppose, dans le cas du recueil, l’unification par la typographie, la sélection centrée autour d’un seul auteur et un titre et dans le cas des nouvelles éditions de La Regenta, libérée de coquilles dans La Publicidad (Botrel, 2001, 161) puis de ses illustrations, par exemple, pour arriver —juste à la veille de sa mort— au modèle qui était le sien en matière de livre pour les romans, celui de la bibliothèque Charpentier.

 

Conclusions.

On le voit, l’atelier de l’écrivain Clarín physiquement si éloigné de celui du typographe est en réalité intimement relié à lui, voire, en certaines occasions, déterminé par lui. Car dans la génétique des textes entrent évidemment des éléments extérieurs —intrus— qu’on  a assez tardé à prendre en considération : dire avec Chartier (2006) que les œuvres n’existent que dans la matérialité (typographique et autres) des textes se heurte encore, on le sait, à une conception essentialiste de l’œuvre…

Observer comment l’anonyme cajista (autant que le prote ou l’imprimeur) accompagne l’écrivain au point de devenir pour lui un personnage, un secrétaire et même un auteur-bis de son œuvre à travers les accidents et les avatars du texte, depuis la plus petite coquille jusqu’au dessin de ses successives formes, nous aide à prouver et affirmer conforter encore une conception plus relativiste du texte mais aussi à inverser, dans une certain mesure, la vision traditionnellement admise d’une genèse ordonnée et chronologique, du manuscrit à la typographie, pour une approche davantage polyédrique de la production du texte.

 

         Jean-François Botrel (Université Rennes 2-Pilar)

 

Ouvrages cités :

 

Alas dit Clarín, L., La Régente, Paris, Fayard, 1987.

----, Son fils unique, Paris, Fayard, 1990.

----, Le coq de Socrate et autre contes, Paris, Librairie José Corti, 1992.

Alas Clarín, L., Obras completas. V. Artículos (1875-1878). Edición de J.-F. Botrel e Y. Lissorgues, Oviedo, Nobel, 2002.

----, Obras completas. III. Narrativa breve. Edición de C. Richmond, Nobel, Oviedo, 2003a.

----, Obras completas. IV. Crítica. Edición de L. Bonet, Oviedo, Nobel, 2003b.

----, Obras completas. XII. Cartas (Edición de J.-F. Botrel) e Índices, Oviedo, Nobel, 2009.

Bensoussan, A., José Yxart (1852-1895), Lille, Atelier National de Reproduction des Thèses, 1982.

Blanquat, J., Botrel, J.-F., Clarín y sus editores (65 cartas inéditas de Leopoldo Alas a Fernando Fe y Manuel Fernández Lasanta, 1884,-1893), Edición y notas por Josette Blanquat y Jean-François Botrel. Rennes, Université de Haute-Bretagne, 1981.

Bontmy, E., Dictionnaire de l’argot des typographes. Augmenté d’une histoire des typographes au XIXe et d’un choix de coquilles célèbres. Marseille, Le mot et le reste, 2005.

Botrel, J.-F., "71 cartas de Leopoldo Alas "Clarín" a Sinesio Delgado, director de Madrid cómico (1883-1899) (y seis de Manuel del Palacio)", Boletín del  Real Instituto de Estudios Asturianos, LI,n° 149, En.-Jun. 1997, p. 7-53.

----a, -"Novela e ilustración : La Regenta leída y vista por Juan Llimona, Francisco Gómez Soler y demás (1884-1885)", in : L.-F. Díaz Larios, E. Miralles (eds.), Actas del I Coloquio de la Sociedad de Literatura Española del Siglo XIX. Del Romanticismo al Realismo, Barcelona, Universitat de Barcelona, 1998, p. 471-486.

----b, "La Regenta mise en livre", J. Poulet (éd.), in : Hommage à Simone Saillard, Textures. Cahiers du CEMIA, Univ. Lyon II, 1998, p. 11-23.

----, "En el taller de Clarín : de la cuartilla a la página", Turia, 57 (2001), p. 151-163.

----a, -"Los años de aprendizaje", in : Leopoldo Alas Clarín, Obras Completas. V. Artículos (1875-1878). Edición de Jean-François Botrel e Yvan Lissorgues, Oviedo, Ediciones Nobel, 2002, p. 18-61.

----b, "Clarín, entre Madrid y Asturias (1871-1883)", in : Coletes, Agustín (ed.), Clarín, visto en su centenario (1901-2001). Seis estudios críticos sobre Leopoldo Alas y su obra, Oviedo, Real Instituto de Estudios Asturianos, 2002, p. 113-130

----, « De la confrérie à l’association : la mémoire professionnelle des gens du livre en Espagne au XIXe siècle », in: La prosopographie des hommes du livre, ENSSIB, Lyon, 22-23 avril 2005, Bibliothèque numérique de l'École Nationale Supérieure des Sciences de l'Information et des Bibliothèques, http://www.enssib.fr/bibliotheque-numerique, 10 p.

-Libros y lectores en la España del siglo XX, Rennes, JFB, 2008, 112 p.

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Kamada, T., La statégie de la composition chez Balzac. Essai d’étude génétique d’  « Un grand homme de province à Paris », Surugadai—Shuppansha, 2006.

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----, Manuel Altolaguirre, impresor y editor, Málaga, Universidad de Málaga/Publicaciones de la Residencia de Estudiantes, 2008.

Tintoré, M. J., « La Regenta de Clarín y la crítica de su tiempo, Barcelona, Lumen, 1987.

 

Illustrations :

1. La page de titre de El Señor… telle que la souhaite Clarín

2. La page de titre de El Señor… telle que la compose le typographe

3. Première page du conte La Trampa écrit pour El Liberal et publié dans Madrid Cómico (Archives Tolivar Alas)

4. Leopoldo Alas Clarín vu par le caricaturiste Cilla en 1883

 



[1] « Permitid que tribute una lágrima a la memoria de aquellas ilusiones mías, llenas de sandeces (sauttises) y de ripios métricos » (Alas, 2002, 605).

[2]  « como puede suceder que dentro de cien años cualquier anticuario encuentre el número 399 de El Solfeo, no me gusta que piense la posteridad que hubo en el mundo un Clarín que se llamaba sandio a sí mismo » (Alas, 2002, 610-611).

[3] « Los cajistas me han atribuido una modestia de la que no me siento capaz. Conste, pues, de hoy para todos los siglos, que lo de las sandeces no es cosa mía » (Alas, 2002, 611).

[4]  Pour les lecteurs non hispanophones, cf. Alas 1987, 1990 et 1992.

[5] Des exemples dans mon étude sur « Los novelistas… » (Botrel, 2009b).

[6] La publication des lettres de Manuel Fernández Lasanta ou Sinesio Delgado à Clarín fournira certainement d’autres informations et un autre point de vue.

[7] C’est ainsi que Clarín se propose de prouver à l’aide de facsimilés qu’il n’y a que deux écrivains à écrire plus mal que lui : Galdós et Sánchez Pérez.

[8] « la materialidad de escribir ». Clarín a néanmoins la capacité d’écrire plus clairement, par exemple, en transformant un brouillon informe de sa pièce de théâtre, Teresa, écrit en douze jours en un joyau calligraphique, pour qu’on pût « comprendre son écriture », au prix d’un travail de trois mois, assure-t-il (Alas, 2009, 432).

[9] «¡ cuántos solecismos y aun disparates (…) me han hecho decir los cajistas ! » (Alas, 2003, 858), et à un certain Mariano Rentz qui se plaint, par voie de presse, de ce que Clarín l’ait appelé Rentoy, : « No he sido yo, señor Rentz ; han sido los cajistas. Yo no me puedo quejar de las erratas, por motivos que pertenecen a la vida privada » (Alas, 2004, 651).

[10] Cf. « se habían comido renglones enteros » (Blanquat, Botrel, 1981, 51) ; « las párrafos que escribí por riguroso orden lógico y dialéctico, los veo en confusión caótica »  (Alas, 2003, 858).

[11] « En el Imparcial del Lunes 16, se publicó un artículo mío sobre los Episodios Nacionales (..) no sé si los cajistas u Ortega le quitaron cerca de la tercera parte y lo plagaron de erratas ; además debía ser el primero de una serie y se ve reducido a único  (…) por todo lo cual el dichoso artículo ni se entiende ni acaba. Además es segundón porque yo había escrito otro hace meses en que hablaba del último episodio, pero se perdió en el buzón de El Imparcial » (Alas, 2009, 90).

[12] « porque dejaron sin aplicación las correcciones que yo hice », écrit-il à Galdós (Alas, 2009, 125) ; « por haber dejado sin corregir con arreglo a mis pruebas », écrit-il à Picón (Alas, 2009, 124).

[13]  « cuiden bien la corrección de Apolo en Pafos porque lleva una porción de nombres griegos y hasta se meten a corregirme los cajistas a mí ; así donde decía Diona bien claro me pusieron Diana y he cambiado el nombre para que no haya dudas » (Blanquat, Botrel, 1981, 34). On peut aussi se demander sur la présence du terme « medianil » qui en termes d’imprimerie « el crucero de la forma o molde que deja el espacio blanco de las márgenes interiores » est intéressant  à la place de « medianería » (mur mitoyen) est dûe à un lapsus de type professionnel.

[14]  Cf. l’allusion de Clarín à ses « patas de mosca, por las cuales se explica el sinnúmero de disparates que me hacen decir los cajistas, aparte de los que se deban a causas extrañas a la caligrafía » (Alas, 2009, 432), mais aussi ses commentaires sur les premières épreuves de Su único hijo qui sont atroces «  en parte por culpa de mi mala letra, pero también en parte por el poco cuidado de los impresores » (Blanquat, Botrel, 1981, 55).

[15]  « avise usted que manden pruebas marcadas con claridad, pues algunas estaban tan borrosas que no se conocía si estaba bien o mal el texto. Además las mandan con margen estrechísimo y no se puede añadir ni corregir bien » (Blanquat, Botrel, 1981, 51).

[16] « Hágame el favor de dar órdenes para que esto no se repita » (Blanquat, Botrel, 1981, 34) ;  « le suplico la más exacta corrección » (Blanquat, Botrel, 1981, 31)

[17]  « Lo que no me gusta es que los cajistas hayan prescindido de muchas de las correcciones que yo hice y que hayan pasado las mismas erratas de las pruebas en muchas ocasiones. … » Blanquat, Botrel, 1981, 34). Il observe encore des erratas dans les épreuves en feuilles (capillas) de Un viaje a Madrid et envoie deux cahiers à l’éditeur « por si hay tiempo de corregir algunas erratas importantes que señalo » (Blanquat, Botrel, 1981, 24).

[18] « en la puntuación no se me obedece siempre, y las comas solo sabe manejarlas el escritor que sabe lo que quieren decir » (Blanquat, Botrel, 1981, 38).

 

[19]  « dada la índole de mis libros de críticas, estas erratas me molestan mucho » (Blanquat, Botrel, 1981, 34).

[20]  « las erratas me desesperan y dan ocasión para la malediciencia »  (Blanquat, Botrel, 1981, 30).

[21]  « creo que va a salir (Apolo en Pafos) con muy pocas erratas, y mucho me alegraré porque los criticastros han dado en la flor de agarrarse a ellas » (Blanquat, Botrel, 1981,.36).

[22] « cuidado con las erratas » ; « cuídeme las pruebas » ; « ojo con las pruebas de hoy que va mala letra » ; « ahí va eso que no sé lo que es ; lo he escrito a las 12 de la noche después de cenar. No tengo tiempo a leerlo, puede haber repeticiones, mil errores. Cuídeme por Dios de las pruebas y hasta de la gramática porque no respondo de nada. No tengo tiempo a salvar los… » ; « cuídeme las pruebas que va escrito muy de prisa » (Botrel, 1997, 15, 17, 35,48,48).

[23] Cf. «Cuando se imprima, si no hay costumbre o tiempo de enviar las pruebas al autor, le suplico que cuide que no haya erratas, particularmente en los nombres propios, donde son los más probables » (Alas, 2009, 542). 

[24]  Cf. « Polimnia subrayaba con la voz lo que yo subrayo con la pluma » (Alas, 2003b, 989). Sur la rhétorique de l’italique chez Clarín, cf. Mainer, 2005.

[25]  Cela l’amène quelquefois à exiger des deuxièmes et même des troisièmes épreuves : « si hay alguna (duda) en algo vengan segundas pruebas » (Blanquat, Botrel, 1981, 34);: « quiero segundas pruebas sin falta porque hay muchas erratas que si pasaran convertirían en absurdo lo escrito. Devolveré las segundas inmediatamente » (Blanquat, Botrel, 1981, 39) ; «quiero segundas pruebas sin falta. En general estaba bien, pero se habían comido renglones enteros » (Botrel, Blanquat, 1981, 51).

[26] « El Sr. Mellado se lamentaba un día de que los cajistas de El Imparcial se le habían sublevado por mi culpa » (Alas, 2004, 651).

[27] « Se queja el Sr. Rentz porque me hacen llamarle Rentoy, y no se me quejó Dios a quien me hicieron llamar Díaz en cierta ocasión » (Alas, 2004, 651).

[28]  Pour une période plus récente, un exemple intéressant nous est offert par les discusssions particulièrement tendues entre l’éditeur Vergès et le romancier Delibes à propos de l’utilisation  de l’italique (Delibes, 2002).

[29] "los capítulos han de ir encabezando página de derecha siempre, no seguidos como vienen en las pruebas"  ; « los capítulos repito han de ir en página separada y comenzando como si llevaran un título especial ; no porque no llevan más que le numeración romana dejan de ser tales capítulos » (Blanquat, Botrel, 1981,51-52),

[30] « quisiera cierto lujo que compensara el tamaño,  cierto lujo que compensara el tamaño». l

[31] « las dos citas que hago de Villegas y Argensola han de ir cada cual en su página dejando la de detrás en blanco sin repetición del título, muy hacia abajo de la página, y en cada una de estas debe ir pocos tercetos, siempre el mismo número (5 o seis lo más) separados y comenzando por mayúscula cada terceto aunque sigue la oración anterior. Quisiera, si pudiera ser, una letra un poco mayor y papel algo mejor, más fuerte que la de otras veces. En fin, allí usted verá lo que puede hacer » (Blanquat, Botrel, 1981, 44)

[32]  « se hubiera evitado si se hubiera hecho lo que yo indicaba : muchos claros, letra mayor, pocos tercetos en cada página » (Blanquat, Botrel, 1981, 45).

[33]  « en estas anchuras hay una forma de lujo cuando se saben tomar bien las proporciones. Pero en fin ahora es tarde y lo que corre prisa es que usted publique el folleto » (Blanquat, Botrel, 1981, 45)

[34] On peut voir, dans les reproductions ci-contre (ILLUST. 1 ET 2), comment le typographe tient compte des indications de Clarín, mais en composant toute la page en vase de Médicis et sans précision de date. Au moment de déposer le livre à la Biblioteca Nacional, Clarín applique sur la page de titre sa signature officielle: « Leopoldo García Alas » (cf. Blanquat, Botrel, 1981, 72-74).

[35] « quiero que sobre el papel amarillo no haya más que letras negras y nada de dibujos  (…) el papel, no muy grueso y suave, es el más apropósito » (Blanquat, Botrel, 1981, 52).

[36] Cf. "Mi próxima novela ocupará entre unos 25 y 30 pliegos como los de Sermón perdido en igual letra" escribe Clarín. Calculo por las pruebas que llevo corregidas que con lo escrito se forma el tomo" (Tintoré, 1987,10).

[37] « Yo he perdido los números en que salió el Cura ; lo sigo de memoria » (Botrel, 1997, 35).

[38]  Dans le cas de La Regenta , les premiers chapitres semblent néanmoins avoir donné lieu à une mise au net, les suivants répondant aux caractéristiques évoquées.

[39] « La letra es mala y van algunos blancos y otras cosillas, pero todo se arreglará al corregir yo las pruebas » (Blanquat, Botrel, 1981, 33).

[40] »« la letra es muy mala, pero aunque vengan muchas erratas no importa pues yo al corregir las pruebas haré lo que ahora no puedo porque me distraería del trabajo » (Blanquat, Botrel, 1981, 30).

[41]  « No se olvide de mandarme el original con las pruebas porque sino me sería imposible corregir muchas cosas » (Blanquat, Botrel, 1981, 30).

[42]  Même lorsque l’original se compose de textes déjà imprimés, Clarín préfère corriger sur épreuves  (cf. Blanquat, Botrel, 1981, 59).

[43] Cf. « Al corregir las pruebas de este artículo —5 de julio— digo que Cánovas ya viene. Bien venga, si viene solo » (Alas, 2003b, 1440).

[44] . « Sólo así pude concluir La Regenta, que fue escrita como artículos sueltos, sin quedarme yo con borrador (como ahora) y olvidándome a veces hasta de los nombres de algunos personajes" (Blanquat, Botrel, 1981, 43).

[45] « empezaré a enviarle a Vd algo cuando llegue a la cuartilla doscientas cincuenta ; así puede ir Vd imprimiendo y yo corrigiendo y de camino adelantar en la obra, yendo a mucha distancia de la imprenta para que no me coja. Esto fue lo que hice con La Regenta» (Blanquat, Botrel, 1981, 40) ; « se lo iré mandando según vayan saliendo las cuartillas, para que ya comience la impresión y corrección de pruebas y así ganemos tiempo » (Blanquat, Botrel, 1981, 27).