MISSION 1934

(Saint-Malon-sur-Mel. Bulletin municipal, n° 67, décembre 2019, pp. 26-27-.


 

« Mission 1934 », c’est ce qu’on peut lire sur un écriteau apposé sur le fût du calvaire de la place de l’Eglise de Saint-Malon. 

         En effet, cette croix en ciment armé portant un Christ en fer de fonte fut inaugurée, le 25 décembre 1934, en clôture de la mission qui avait débuté le 9. Une mission, c’est à dire, pour l’église catholique, « un temps de réflexion, un temps où on règle les affaires de son âme et pour tous ceux qui le veulent, un temps de salut, un coup d’éponge sur le passé, le nettoyage à fond des consciences », comme il est écrit dans le bulletin paroissial de décembre 1934 ; « une année mauvaise à bien des égards », selon le rédacteur anonyme de l’article.     

         Au programme de cette mission (il en existe une version imprimée à afficher dans chaque maison),  des réunions spéciales (pour les enfants, les jeunes filles et les jeunes gens), des réunions générales et des dialogues qui, s’agissant de ceux-ci, n’ont pas fait « église comble ». Pour l’occasion, l’intérieur de l’église a été décoré d’élégantes guirlandes (de feuillage) piquées de glycines et coquelicots ou liserons. « Tombant des voûtes, courant le long des murs, encadrant les fenêtres : on en voit partout ». Des jeunes filles sont allées jusqu’à renoncer à se rendre à la populaire foire de Saint-Nicolas pour les confectionner.

         Ce sont deux missionnaires diocésains du diocèse de Rennes, le P. Portier (48 ans) et le P. Verdier (35 ans) qui ont assuré la prédication et les échanges. Coût pour la paroisse : 1 200 francs, auxquels s’ajoutent les frais de nourriture (15f x17 jours= 255 f.) et ceux d’impression d’images-souvenir (75f).

         Dans le bilan dressé par le recteur (ce qu’il appelle les « retours »), il est précisé qu’il y a eu un total de 653 communions en plus de celles des enfants et des malades et infirmes : 98 de jeunes filles, 256 de femmes, 299 d’hommes et jeunes gens. Il y a eu moins de 20 « récalcitrants » (« ceux qui ont refusé la grâce qui leur était offerte »). A cette époque, dans les 215 foyers et 200 maisons de Saint-Malon, il y avait près de 900 habitants (877 en 1931) recensés dans le « Livre des âmes » de la paroisse.

         Cette mission est aussi l’occasion de remplacer le grand calvaire en bois érigé en 1900 et rongé à la base, ainsi que le beau Christ, également en bois et détérioré par les intempéries, tels qu’ils figurent sur la couverture du bulletin paroissial d’alors (cf. l’illustration). Une souscription a été lancée et 70 paroissiens dont les noms figurent dans le Livre de paroisse, ont remis des offrandes pour l’érection de ce calvaire, pour un total de 1 493 francs. Quelques francs seront encore reçus par la suite. La nouvelle croix en ciment sera élevée par M. Pratta de Saint-Méen pour un coût de 2 500 f.,  et le Christ en bois sera remplacé par un « superbe Christ en fonte polychrome mesurant 1m75 des pieds à la tête », fourni, pour 1 200 f.   par la maison Chauvin, de Pipriac où le recteur de Saint-Malon, Léon Gautier, était vicaire jusqu’en avril 1933.

         Avant d’être immobilisé sur la croix, le Christ, « porté sur un brancard tendu de rouge et de blanc et merveilleusement décoré, élevé sur un char noyé sous les fleurs et traîné par trois chevaux de front, ou plutôt par trois juments richement caparaçonnées mises à disposition par P. Lorand de Saint-Jean », fait le tour de l’église puis s’engage sur les routes de Plélan et Saint-Méen et passe sous 23 arcs de triomphe érigés par les habitants du bourg (ceux qui  demeurent au nord de l’église, ceux du chevet, de la route de Saint Méen et de Plélan), et par ceux de la campagne et des différents hameaux (comme La Turais ou Tringaran) qui se sont parfois associés, à deux (Le Haut-d’Avril et la Villette/ L’Epinay et Le Cormier/Le Bourg-Nouveau et le Chêne/ Saint-Jean et la Touche), à trois (La Ville-Moizan, le Grippé et les Buissons/ Coquentin, les Clos et Touche-Guénou/ La Mouette, le Pré-Hallé, la Brousse/ la Ville-Houée, le Chesnot, la Feuvrais/ Launay, la Ville-ès-Chollet, la Gatelais), à quatre (Le Grand-Launay, Hellé, la Touche-Marou, la Gaudinais/ le Bois-Roux, le Bas-Trémel, les Clos-Retord, la Brunais), à cinq (La Croisée, le Haut-Bel-Air, les Haies, la Mursonnais, Villegâte/ Ranlou, la Ville-ès-Orain, la Noë-Grignon, la Jossais, le Levran/ Rouault, la Ville-ès-Pollet, la Pierre, la Landelle, la Ville-ès-Baux), et jusqu’à six (La Motte-de-Lourme, le Verger, la Ville-Guérin, la Ville-Eon, le Verger, la Sangle).

         La procession est « suivie d’une foule considérable chantant à pleine voix ».

         Vient enfin le moment de l’immobilisation sur la croix et de la bénédiction par le curé-doyen de Saint-Méen, tandis que l’assistance chante « Vive Jésus, vive sa croix ». 

         La mission se clôt avec  la cérémonie des adieux où, selon le bulletin paroissial,  « il aurait fallu deux églises comme celle de Saint-Malon pour contenir la foule ».

         Pour perpétuer la mémoire de cet évènement (d’autres missions avaient eu lieu en 1852, 1901, 1917 et 1924),  une « belle et grande  image » a été éditée, que des Malonnais ont certainement conservée.

 

                                                                                J.-F. Botrel

 

NB. Cet article a été rédigé à partir du Bulletin paroissial de Iffendic, Saint-Malon, St Maugan, St Gonlay et Bléruais de mars et avril 1935, et des informations contenues dans le Livre de paroisse de Saint-Malon et de documents conservés au Archives diocésaines qui récèlent bien d’autres informations sur l’histoire et la vie de la paroisse.