«Venise sur Vilaine» 

 Dès sa fondation en 1867 la SRR s’est aussi donnée pour but de vulgariser à Rennes le goût du canotage et des divertissements publics.

 C’est ainsi qu’au cours du XIXe siècle elle a organisé, en liaison avec la Municipalité, de nombreuses fêtes nautiques de jour, suivies dans beaucoup de cas de fêtes de nuit, pour le plus grand plaisir et émerveillement des Rennais.

 Une affichette conservée aux Archives Municipales de Rennes propose le programme de celles du 30 juin 1872 (doc. 1).

 Dans le Registre des délibérations de la SRR figure aussi (doc. 2) un contrat passé en 1882 entre celle-ci et un entrepreneur de spectacles qui donne une idée précise du matériel nécessaire à l’organisation de telles fêtes:

Illuminations.  3 500 verres de couleur posés et allumés en guirlandes et lustres pour Cinq Cent Vingt Cinq francs. Les deux rives du canal devront en être pourvues et il y aura trois guirlandes allant par dessus le canal d’une rive à l’autre.

1 500 verres ordinaires pour Trois Cent Soixante Quinze fr. et un certain nombre de ces lanternes servira à illuminer le bateau ponté de la Société. La pose en sera faite par M. Lebouleux, le tout posé et allumé.

25 ballons et soleils n° 3 pour Vingt Cinq francs.

20 ballons et soleils n° 4 pour Quatorze francs.

Artifice d’eau. 100 flammes Bengale Cent francs

50 canards Cinquante francs

50 gerbes Cinquante francs

50 chandelles romaines Cinquante francs

1 bouquet de 350 fusées Cent francs

A cette fête vénitienne participent un grand nombre d’embarcations stationnées sur la Vilaine pour un défilé, en musique, de bateaux décorés et illuminés (la SRR fournit à chacun des lanternes vénitiennes prêtes à allumer). Des prix sont attribués.

Au moins une fois, pour la fête de nuit de bienfaisance du 15 août 1886, les sociétaires de la SRR abandonneront leur élément naturel pour monter jusqu’au Thabor représenter une énigmatique «Pièce allégorique aux Régates Rennaises représentant une yole et son équipe à quatre. Pièce mécanique».

La presse a ponctuellement rendu compte de ces fêtes de nuit. A titre d’exemple, ces extraits du compte-rendu par le Journal de Rennes du 21 juillet 1873, de la fête de nuit organisée sur le canal:

«La fête de nuit avait attiré des milliers de spectateurs. C’est en effet un ravissant spectacle, par une belle soirée d’été que celui des barques illuminées, de ces concerts sur l’eau, de ces feux de formes et de couleurs variées qui illuminent le feuillage des avenues et font étinceler le canal de leurs reflets.

Des gerbes de flammes jaillissent ou sillonnent la surface des eaux, pendant que les barques se promènent lentement aux accords de la musique.

[…] L’effet de l’illumination dans les belles avenues des deux rives était charmant. Sur une longueur d’un kilomètre, les guirlandes de feu suspendues aux arbres et les lustres étincelant sous le feuillage formaient comme une voûte de lumières.

La musique municipale, dans un chaland pavoisé, illuminé de lanternes vénitiennes, faisait entendre les plus harmonieux morceaux de son répertoire».

Reverra-t-on, comme le secrétaire de la SRR en 1880, le canal d’Ille et Rance transformé en «lac de feu» et des embarcations pavoisées glisser «doucement sur les eaux tranquilles du canal transformées en lagunes vénitiennes"?

 J.-F. Botrel

(15 janvier 2017)